Quel rapport me direz-vous entre un paquet de couscous et une plage ?
Et bien il y en a un, … je vous explique.
J’ai la chance d’habiter dans le sud du Sénégal, sur une île dans la région du sine-saloum, endroit magique par ses paysages à perte de vue, sauvages, calmes. Des plages de sables, l'océan tout proche, des méandres de fleuves, de la mangrove et quelques maisons simples isolées ou réunies en petits villages.
Depuis quelques années, nous y dirigeons, mon cher mari et moi-même, une grande structure touristique – un "lodge" comme on dit – et pour recevoir notre clientèle, nous faisons des stocks alimentaires dans une réserve.
Il y a quelques jours, pour des besoins culinaires, j’ai dû aller chercher un paquet de couscous, jusque-là rien d’extraordinaire, sauf que … sur ce paquet il était mentionné, outre la marque, une indication qui a attiré toute mon attention :
« Moulins du Dahra – Zone d’activité Route de la Salamandre – Mazagran / Mostaganem - Algérie »
Le flash est venu instantanément !
Il y a 60 ans, mon père qui était dans l’armée appréciait, comme nous tous, la baignade et pour cela nous allions à la Plage de la Salamandre, près de Mazagran en Algérie. La plage de sable était, à l’époque, à perte de vue avec seulement quelques cabanons sur pilotis. Cela a beaucoup changé depuis, urbanisation oblige.
Sur cette plage, j’y ai les plus beaux souvenirs de mon enfance en Algérie, avec ma famille. C’est d’ailleurs là que j’ai appris à nager grâce à la ruse de mon frère ainé qui avait dégonflé ma bouée une fois arrivés au large.
C’est aussi sur cette plage que j’y ai mangé, pour la première fois, des chips de vraies pommes de terre « à tomber par terre », bien goûteuses, enveloppées dans un vulgaire papier journal par le vendeur ambulant avec son faitout d’huile qui devait servir depuis plusieurs jours. Mais qu’est-ce qu’elles étaient bonnes ! Nous les enfants (j’avais environ 7 / 8 ans), on se les arrachait et on n’en est pas morts, ni même tombés malades. J’en ai encore le souvenir incrusté dans mes papilles.
Nos journées se passaient dans la joie et la bonne humeur, avec en primes des bons coups de soleil, surtout pour mon père très blond de nature.
Nous logions dans un cabanon sur pilotis qui devait être sommaire mais pour lequel j’ai toujours gardé un affectueux souvenir.
La plage de la Salamandre était connue pour ses pécheurs d’oursins et aussi pour ses restaurants où l’on mangeait des moules, le tout ramassé devant les clients.
Toutes ces choses que j’aime encore beaucoup maintenant, sûrement liées au fond de moi à toute cette période d’enfance heureuse pour ma part.
Et puis, il y avait cette immensité sauvage, qui n’existe plus maintenant, immensité que j’ai retrouvée ici pour la première fois, dans le sine-saloum où je vis.
Je me pose alors des questions : est-ce que toute notre vie est réglée, ponctuée par tout ce qu’on perçoit et qui nous construit ? Est-ce que nos chemins se font dans le sillage de nos souvenirs du passé, insidieusement, à notre insu, mais tellement présents ?
Est-ce que c’est pour cela que je me sens tellement bien ici, au milieu de mes paysages sauvages de sable et de mer ? Région qu’il faudra sûrement que je quitte un de ces jours. Un crève-cœur.
Depuis que j’habite dans le sine-saloum j’ai toujours eu dans l’idée d’avoir une petite maison sur pilotis au bord de l’eau, sans jamais vraiment faire le lien avec la plage de la Salamandre de Mazagran.
Il a fallu que je tombe sur cette étiquette de couscous pour déclencher toute cette vague de souvenirs et de rêves enfouis qui ne se réaliseront sûrement jamais car trop compliqués.
Voilà donc ce que peut faire ressurgir un simple paquet de couscous !
Je vous mets ci-après quelques (anciennes) photos de la plage de la Salamandre et d'un cabanon de l'époque ainsi que le paquet de coucous.
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